Partir pêcher sur l’île de Mull

Samedi 10 août 2019. J41. Ecosse. Le lever de soleil est splendide. La lumière rose se  propage dans le ciel et se décompose dans le bleu des vaguelettes de la mer.

En voyageant en camping car, j’espérais profiter plus souvent des levers et des couchers de soleil, mais c’était sans compter les nuages écossais… Alors ce matin, je déguste seule ce moment en écrivant nos aventures de la veille.

Puis je réveille mon monde tôt. Nous avons 1h30 de route à faire avant d’arriver à Lochaline où nous voulons prendre le bac pour l’île de Mull. Je veux profiter de notre première journée sur l’île. Et ce matin, tout ce passe très bien.

En route vers l’île de Mull

Je prends le temps d’expliquer précisément à Lison comment on allume le feu sous la casserole et elle s’exécute parfaitement. Nous démarrons à 8h30, en véritable exploit !

À Lochaline, nous devrions retrouver Mélody et François, deux français en vacances en Écosse qui étaient venus nous interpeller à Édimbourg en voyant les inscriptions sur notre Camping car. Nous avions discuté avec eux de nos deux périples et nous avions plein de choses à partager.

Eux voyagent en van qu’ils ont aménagé avec juste un lit dépliant et des rangements. Ils parcourent l’Ecosse à la recherche de spots pour pêcher, leur passion commune. À Édimbourg nous avions connecté nos comptes Instagram et Polarstep et depuis, nous suivions à distance nos pérégrinations en espérant que nos chemins se croisent pour partager une partie de pêche.

Le week-end dernier ils sont arrivés à Skye deux jours avant nous, mais face à la quantité de touristes sur l’île, ils avaient fui vers le nord. Hier, ils prévoyaient de gravir le Ben Nevis, le plus haut sommet d’Écosse, avant de rejoindre Mull eux aussi, mais ça les faisait arriver au moment où nous en partions. Alors je leur propose de faire leur boucle dans l’autre sens et ça leur convient !

Normalement, nous nous retrouvons ce matin pour prendre le bac ensemble. Normalement. Arrivés, nous ne voyons pas leur voiture. Nous leur envoyons un message et nous nous installons dans la file d’attente du bac en pensant que nous n’aurons pas le prochain bateau, vu les voitures devant nous. Je file alors au village pour tenter de trouver du pain, ma quête quotidienne. Mais avant que je ne termine mes achats, Pierre m’appelle pour me dire de me dépêcher : il embarque. Je paie en vitesse et descends en courant jusqu’au petit port, mon sac de pain de mie branlant au bout de mon bras. J’entre dans le bac sous les yeux ébêtés d’un homme en orange qui me dit, that’s ok, we don’t go now. You are in the campervan ? Nous nous sommes encore fait remarquer… D’autres véhicules embarquent dont un gros bus. En fait, on en rentre du monde dans un bac ! À bord, point de copains mais un message, “on vous a loupé, on était en train de boire le café. On se retrouve à Tobermory”. On va y arriver !

Tobermory

L’île de Mull, je l’ai repérée pour les bons fromages qui en viennent. Mais nous avons aussi très envie de s’offrir une expédition en mer pour aller découvrir l’île de Staffa, que j’avais notée d’un cœur rose pour ses incroyables formations basaltiques. Arrivés sur l’île, nous croisons un panneau de signalisation triangulaire “attention aux canards” ! Chouette ! Plus loin, “attention aux loutres” ! Génial ! Et sur un îlot rocheux, à côté de la route, une colonie de phoques ! Nous allons adorer cette île !

Tobermory est un petit village très mignon où les maisons du front de mer sont peintes de différentes couleurs vives. Et en plus, il fait beau ! Le Routard disait que Mull était une île particulièrement pluvieuse, n’importe quoi !…

Je prépare une salade de riz avec pleins de légumes et du haddock fumé d’ici, un régal ! Un régal pour les parents, comme d’habitude les filles font la grimace. Hé bien tant pis pour elles, nous en aurons deux fois plus !

Mélody et François nous rejoignent et nous nous présentons en mangeant. C’est incroyable comme nous pouvons tout faire pour passer quelques jours ensemble, alors que franchement, on ne se connaît ni d’Eve, ni d’Adam ! Confiance spontanée. Dès Édimbourg, nous avons senti que c’étaient de jeunes gens super intéressants. Et nous ne nous sommes pas trompés !

Nous nous accordons sur le programme : recherche commune de fromages, pêche et excursion sur Staffa. C’est parti !

Ile de Mull cheese et Hebridean blue

À Tobermory, point de fromage. C’est incroyable, cette île possède un fabricant réputé de fromage et on n’en trouve pas dans la ville principale ! Nous prenons directement la direction de la ferme. L’endroit est super joli, un beau tea-room-boutique mais il n’y a personne. Nous sommes un samedi du mois d’août ! La grand-mère de la ferme nous accueille et nous explique seulement que nous pouvons faire des achats dans leur boutique et qu’on a qu’à se servir nous même et payer : la monnaie est là, la machine à cartes bleues est là. Et elle s’en va. Incroyable. Mais leur étal de fromages est quasi vide, il ne reste plus que du “Isle of Mull”, un fromage type “Laguiole” que j’avais déjà trouvé ce matin à Lochaline. Moi, je cherche leur bleu, celui que nous avions trouvé à Ullapool. Il y a beaucoup de français en Écosse, j’ai l’impression que ce pays s’est fait dévalisé de ses bons fromages ! Mélody et François s’en prennent 3 morceaux, paient, et nous continuons. Direction Calgary, la plus belle plage de l’île. En chemin, un tea-room. Pierre s’arrête. Celui-ci est animé. À côté de la vitrine de gâteaux faits maisons, une vitrine de produits locaux contenant des bières et, enfin, un peu de fromage ! “Île de Mull”, encore, “Bleu des Hébrides”, enfin ! Et aussi un petit fromage inconnu, rond, recouvert de cire noire, c’est une production de la même fromagerie affiné au Whisky. Je prends ! Et nous rejoignons Mélody et François à la plage. On le saura : en Écosse, si vous cherchez du fromage, rendez-vous dans les salons de thé !

Baie de Calgary

La plage de Calgary est bondée de monde. Enfin, bondée à la mode écossaise, c’est pas Gruissan… Et c’est sous de gros nuages ! Ça doit être merveilleux ici quand il fait beau !

François nous a gardé une bonne place et propose à Pierre d’aller pêcher pour manger du maquereau ce soir. Un cadeau qui tombe du ciel pour lui qui pêchait avec son papa quand il était enfant. Mélody et François sont équipés de float-tubes, deux embarcations gonflables. Les grands gamins déplient leurs jouets.

Ils préparent leur cannes sous les yeux écarquillés des filles qui n’hésitent pas à mettre la main à la pâte : elles se disputent le gonflage des float-tubes. Mélody prend le temps de tout leur expliquer. Ils ont une boîte d’hameçons de toutes les formes et de toutes les couleurs, c’est la grande découverte pour elles ! Papa enfile une combinaison intégrale qui le fait ressembler à un cosmonaute et avec François, ils prennent le départ dans l’eau turquoise des baies écossaises. Le rêve.

Partie de pêche sous les yeux des phoques

Pierre nous raconte l’aventure :
En quelques coups de palme nous nous éloignons dans la baie pour rejoindre les zones rocheuses, là où vivent les poissons.

François jette un coup d’oeil à droite : “Il y a des cormorans”. Un coup d’oeil en avant : “Regarde, un phoque nous observe”. Effectivement il sort la tête de l’eau. Puis un deuxième phoque. Nous observent-ils ? Attendent-ils que nous prenions un poisson ? Veulent-ils nous faire partir ? Se moquent-ils de nous avec notre attirail ?
François prend mon avis : “Tu crois que ce peut être dangereux de pêcher si près des phoques ?
– Bah on va voir
– Mouais…”.

Puis il m’avertit. Nous ne faisons pas le poids à côté des cormorans et des phoques, nous risquons de ne rien attraper tant qu’ils sont là. Nous nous éloignons de leur zone pour s’approcher d’un îlot et tentons notre chance par là. Et ça marche : je prends mon premier poisson, un petit lieu. François commence à attraper des maquereaux, il a flairé le banc, nous lançons à présent tous deux nos leurres de ce côté ci et levons de beaux spécimens.

Je suis en train de penser que nous sommes bien là, les pieds dans l’eau, calés sur notre flotteur, le panier qui se remplit de maquereaux, avec cette magnifique baie pour décor. Il manque juste la bière. Et à ce moment précis, François de me lancer : “Tu veux une bière ?”. J’ai affaire à un pêcheur expérimenté.

Le maquereau est vif et assez puissant. La bagarre est inégale, certes, mais c’est un plaisir d’arriver à le remonter. Nous nous arrêterons avec juste ce qu’il faut pour se nourrir ce soir, cinq beaux maquereaux, et un lieu que nous garderons au congélo du camping-car pour plus tard. Nous relâchons les quelques lieus et maquereaux que nous prenons en plus, puis nous palmons contre le vent pour retourner sur la plage. Bon d’accord je me suis fait échouer sur la partie rocheuse de la baie afin de palmer le moins possible, la fatigue se fait sentir, il ne faudrait pas que j’attrape la crampe au mollet, contre le vent.

En bref, j’avais hésité à prendre ma canne à pêche au départ de ce grand voyage. Puis je me suis dit que si je la prenais je ne m’en servirai pas et cela prendrait de la place pour rien. J’avais parié sur l’envie qui me rattraperait en posant les yeux sur les magnifiques lacs (je n’avais même pas pensé à la pêche en mer car pas habitué). Nous y sommes, il va falloir que je m’équipe. Merci Mélody et François.

Partie d’aquarelle

Pendant ce temps, nous proposons aux filles de les suivre en longeant la côte. Il y a des cailloux, elles acceptent de quitter le sable. Nous suivons des yeux nos deux pêcheurs sur leurs coquilles de noix, tout en s’arrêtant devant : des carapaces de crabes, des jolis cailloux, des flaques de boue, des limaces par dizaines, des brebis toujours dans le paysage,… Au bout du bout, nous nous asseyons et je sors l’aquarelle. Mélody écarquille les yeux à son tour. “Tu veux une feuille ? Ho non, moi je ne sais pas dessiner ! Tu sais, la montagne, si tu ne la dessine pas exactement comme elle est, il n’y a que toi qui le verra”. Les filles se pressent et comme d’habitude, font leur premier au crayon, mouillent leur feuille, ajoutent leurs couleurs et leurs nuances. Elles sont fières de montrer à leur tour leur savoir-faire à Mélody. L’aquarelle, nous aimons car, si ce n’est pas trop précis, si les couleurs se mélangent, ça donne tout son charme à notre peinture. Devant tant d’enthousiasme et de légèreté, Mélody se prend finalement au jeu.

Puis la soirée coulera doucement : retour de nos expériences de l’après-midi autour de l’apéro fromages de Mull, barbecue de maquereaux par François, petit concert ukulélé-accordéon par Pierre et Capucine, puis nous nous serrerons tous – et ça rentre – dans le camping-car pour apprécier le repas, discuter.

Les filles sont elles aussi ravies de rencontrer des adultes pour pouvoir leur raconter leur vie, et celle de leurs parents.

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2 réponses à “Partir pêcher sur l’île de Mull”

  1. Avatar de Maman Claudine
    Maman Claudine

    ATTENTION : Très mauvaise expérience au sujet des float-tubes : une fois assis, surtout ne pas accrocher la sangle entre les jambes !!! Philippe a été à deux doigts de se noyer. Sa canne à pêche tombée à l’eau, il s’est penché en avant pour la retenir et le gonflable s’est retourné sur lui. La sangle l’a empêché de se libérer !!! Prisonnier du bateau, la tête sous l’eau, le pantalon de pêche lourd car rempli d’eau jusqu’aux bottes et palmes aux pieds, plusieurs minutes avant de pouvoir se redresser à la force des muscles des cuisses. Il s’est vu mourir… son gendre trop loin pour l’aider et moi au vide-Grenier à côté ! Cauchemars les nuits suivantes. A bon entendeur…

  2. Avatar de creusoise
    creusoise

    le petit fromage rond couvert de cire noir , je pense que c’est un cheddar parfumé (au whiskey dites-vous)
    il y a les mêmes avec d’autres saveurs (ils ont la croûte de cire de couleur différente)

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