La cabane au bout du monde

22 août 2018. 3h. « Maaamannn ». « C’est quoi ce bruit ? Elle s’étouffe ? ». « Non, elle vomit ! » Branle-bas de combat, on descend tous les deux de notre capucine, j’attrape mon bébé et zou, dans la douche pendant que Papa s’occupe des draps de lit. Comme nous sommes installés à proximité d’une rivière, nous pourrons remplir le réservoir demain et j’enchaîne avec une lessive des draps et doudou dans le bac de douche, avant que Pierre ne les étende dehors à la lampe frontale. Les draps de lit auront une journée pour sécher parce nous n’en avons pas pris d’autres. Solène est mise dans notre lit, trop heureuse de se retrouver entre son « petit Papa chéri » et sa « petite Maman d’amour » elle se retourne de l’un à l’autre pour nous bisouiller, nous caresser. Puis finira endormie en travers pour avoir le tête sur Maman et les pieds sur Papa. La nuit ne fut pas reposante.

Alors ce matin, on prend le temps. Je repère dès ce matin un emplacement pour le soir. Il nous faut traverser la plaine Suisse pour retrouver des montagnes. Je vise le Parc naturel du Doubs, à la frontière Suisse et sur notre route pour Besançon. Nous prenons la route à 11h et arrivés à midi, nous sortons de l’autoroute pour trouver un coin à pique-nique. Nous cherchons longtemps. Pas de jeux d’enfant dans ces villages. Nous prenons une toute petite route qui monte, la vue est belle mais nous ne trouvons pas d’emplacement assez grand pour se garer et pique-niquer à l’ombre… Nous redescendons au village d’à côté, toujours pas ni de parc, ni de jeux d’enfant… Mais c’est quoi ce pays ?? Au moment où le désespoir nous gagne, Emile-Pat’ arrive sur un parking public au bord de la rivière où est aménagé un espace baignade. Plusieurs personnes sont en maillot, font bronzette ou nagent. Quelle chance ! Pendant que je prépare le pique-nique, les filles enfilent leurs maillots et nous nous installerons à l’ombre, les pieds dans l’eau.

Par contre, le Parck4night que j’avais repéré est au bord d’une route très passante et on ne peut pas y rester la nuit. On essaye un autre à proximité, pas possible, puis un autre, non plus. Nous n’avons pas de chance en ce moment avec les Parck4night, ou peut-être est-on devenu trop exigent ?… Je repère un autre emplacement à 15 minutes de là mais qui a de très bonnes appréciations. Il est à proximité d’un beau chalet à disposition des randonneurs.

L’arête des Sommêtres

Et effectivement, l’endroit nous plaît, nous sommes au milieu de vaches et chevaux et il y a de l’espace pour jouer. Il y a un bovi-stop pour entrer dans le petit parking, c’est donc Emile-Pat’ qui est parqué au milieu des vaches en liberté dans leur pâture. Les filles entreprennent de suite la construction d’une cabane pendant que Pierre et moi dégustons un café. J’avoue que je suis un peu triste. Nous sommes à la frontière française, donc au bout de notre périple. Et j’ai le sentiment qu’au final, nous nous sentons bien, tous les 5, en carapate. Un suisse qui passe par là nous interpelle avec son accent fabuleux. Il nous indique qu’il y à, à 15 minutes de marche de là, un refuge avec une vue fabuleuse qu’il ne faut pas que l’on manque. On a l’impression qu’il nous confie un secret bien gardé.

Alors, Pierre propose que l’on prenne le repas du soir dans nos sacs à dos et que l’on s’y rende pour regarder le coucher de soleil. Banco ! Il fait chauffer des patates pendant que les filles sont toujours affairées à leur cabane. Nous chaussons les chaussures d’aventure, mettons le bébé dans le sac à dos et c’est parti. Le chemin longe d’abord une forêt abrupte dans laquelle nous entendons le son d’un instrument inidentifiable. Peut-être un cor de chasse ? La mélodie de l’instrument fait écho et les montagnes nous paraissent chanter à l’unisson. Magique. Puis nous trouvons le sentier qui mène à ce refuge. Il nous fait suivre une crête où des arbres, de chaque côté, nous cachent la vue. Puis, le sentier est carrément creusé dans le rocher, un escalier au fond d’un couloir de roche. Impressionnant. Un escalier descend. Plus loin, un autre monte et nous amène là d’où venait le son. Un suisse souffle dans un long cor des Alpes qui va de sa bouche jusqu’au sol, seul face à l’infini paysage qui s’ouvre soudain à nos yeux. Nous échangeons quelques mots. Il semble gêné de notre présence. Il était bien, là, tout seul face en haut de son éperon rocheux. Il nous dit qu’il s’entraîne, qu’il ne sait pas bien en jouer car il n’a jamais appris le solfège.

Mais chaque son qu’il produit se propage dans les montagnes de manière magique, se reflétant ça et là pour nous revenir à nos oreilles démultiplié. On dirait que toutes les montagnes chantent avec lui. Quelle beau cadeau nous fait la Suisse pour cette dernière soirée chez elle ! Juste après le musicien, le refuge est caché comme un nid d’aigle dans l’éperon rocheux. Nous découvrons un endroit magique, avec une vue magique. Les toilettes, particulièrement (oui, pour soulager Emile-Pat’, nous visitons toujours les toilettes partons où nous allons). Mais celles-ci sont incroyables. Pour s’y rendre, il faut longer le rocher sur une passerelle métallique pour atteindre un petit recoin aménagé. Les toilettes sont normales, mais le trou semble directement relié au vide et surtout, elle font face à l’immensité du paysage. Passé la visite, nous continuons notre exploration jusqu’au bout de la crête rocheuse, face au coucher de soleil. Parfait pour nous. Pierre nous sort ses patates au fromage, jambon et champignons et nous dégustons notre festin en regardant le ciel rougeoyer, et les nuages former des personnages imaginaires. Le soleil, rouge, est énorme et le ciel de toutes les couleurs, tantôt bleu clair, tantôt orageux, en passant par toutes les nuances d’orange. Quelle belle dernière soirée suisse !

Vous n’en aurez que peu d’images, notre appareil photo s’étant épuisé sans prévenir en cours de balade.

Le retour se fut de nuit. Capucine agrippée à mon bras poussait des gémissements terrorisés à l’idée d’être de nuit dans la forêt. Vraie peur ? Ou chiqué pour avoir le câlin de Maman ? Lison aussi avait peur, mais elle me demande d’arrêter de chanter. (Je chantais pour détendre l’atmosphère et éviter qu’elles entendent tous les bruits que fait une forêt la nuit). « J’ai envie d’entendre les bruits qui font peur. C’est important d’avoir peur ». Les expériences de la vie.

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Une réponse à “La cabane au bout du monde”

  1. Avatar de Éric clément
    Éric clément

    Je comprend la surprise du musicien Suisse, mais difficile de pratiquer le cor des Alpes discrètement 😉
    Bien belle rencontre ! Généralement, c’est juste pour des attractions touristiques qu’on voit et entend ça.

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