Jeudi 23 juillet 2020. Arajärventie, Finlande. Non, ce matin le soleil ne s’est pas levé. Les nuages nous recouvrent et ne laissent passer aucun rayon. L’endroit était pourtant parfait pour se baigner, faire du paddle, déception.
Bon, poursuivons alors notre chemin comme prévu. D’abord aller visiter Turku, voir la mer Baltique et le seul château médiéval de Finlande.
Et pour la deuxième partie de la journée, j’ai une idée derrière l’oreille. Une finlandaise m’a soufflé le nom d’un sauna public à proximité de là, j’ai bien étudié leur site, il est ouvert et semble accueillir les familles avec enfants. Je ne suis pas sûre de mon coup, il faut aller voir.
Turku
Turku n’est finalement pas si proche de la mer Baltique que ce que nous croyions. La ville s’est réfugiée bien avant l’embouchure de la rivière Aura. Nous avons marché, marché et marché encore en direction de la mer, nous nous sommes cassés le nez sur la zone portuaire réservée aux ferries. Donc, la mer, nous ne l’avons pas encore vue.
Château de Turku
Par contre, le château nous l’avons bien vu. Une énorme bâtisse du XIVème siècle postée à l’embouchure de la rivière. Immanquable. A l’origine, il a été construit par les suédois sur une île au milieu de la rivière pour commander la Finlande depuis Turku, alors capitale de cette partie du royaume. Mais la visite ne nous tente pas, il est déjà midi largement dépassé et les estomacs commencent à crier famine. Et nous avons décidé de manger sur l’habituelle place du marché des villes finlandaises, à trente minutes de marche du château…
Nous retraversons les quais de la rivière dans l’autre sens, courageux. Les filles n’en peuvent plus quand nous arrivons à destination, sur une place totalement en travaux sur laquelle les Food-trucks ont disparu. Aïe, perdu. Plan B. Nous avions lu qu’à Turku, il fallait aller voir les anciennes halles de la ville, pleines de commerçants et de quelques petits restaurants. Sauvés.
L’endroit est beau comme tout et nous trouvons une table pour quatre dans un véritable vieux wagon de train intégré à la décoration. Chacun choisit un plat dans une échoppe différente et nous pouvons nous requinquer. Rien de typique mais tout délicieux.
Tous au sauna
Deuxième étape de la journée, ce sauna, à vingt minutes de là. Avant de faire débarquer toute ma tripotée, je pars seule à l’accueil demander si nous pouvons faire un sauna en famille. Nous n’avons jamais fait ça, et je redoute un peu.
Nous sommes au bord d’un lac, toujours, et plusieurs cabanes en bois rouge sont cachées derrière d’énormes stocks de bois de chauffage. Dans l’une, un homme m’accueille un peu surpris de ma demande. Évidemment on peut aller au sauna, même avec de jeunes enfants, quelle question ! Il nous faut juste avoir un maillot de bain. Vous avez bien des maillots de bain ? Me demande-t-il inquiet. Heu… Oui, nous n’aurions rien imaginé autrement. Je paie, et pars chercher la troupe.
C’est bon, enfilez les maillots, on y va ! C’est l’excitation totale, mêlée d’un peu de crainte. « C’est chaud, mais c’est chaud comment un sauna maman ? ». Impossible à décrire, il faut avoir testé.
L’homme de l’accueil nous présente les lieux avec bienveillance. Ici les vestiaires, côté hommes et côté femmes, les douches collectives, et un premier sauna, mixte. Plus loin, il y en a deux autres, plus traditionnels et plus chauds. Et ici, sur la terrasse le bain d’hiver, avec de l’eau à 3°C. Trois degrés !… Et à côté, le bain nordique à 37°C. Ouf, sauvés. Il y a quand même un endroit normal dans ce pays. Ha oui, il y a aussi ce ponton pour se baigner dans le lac si vous voulez. Il doit faire un petit 15 degrés dehors, je n’ose même pas imaginer la température du lac. Bon, commençons par nous mettre au chaud.
Dans les petits vestiaires collectifs, nous sommes déjà dans l’ambiance. Une jeune femme pianote sur son téléphone entièrement nue. D’autres se déshabillent. Mes filles, qui n’ont sans doute jamais vu de gens nus en dehors de notre famille, sont scotchées, litéralement. « Arrêtez de la regarder comme ça, c’est normal ici la nudité » je leur explique. « – Mais elle n’est pas mal à l’aise la dame ? » s’inquiètent-elles. Puis nous passons à la douche, où les femmes, encore nues, ont enlevé leurs maillots pour se savonner.
Par contre, dans le sauna, il faut être « habillé » car on y retrouve les hommes et un Papa déjà dégoulinant de sueur. Les quelques personnes présentes sont toutes assises sur le banc supérieur. Moi, je fais asseoir les filles au milieu et en bas. Plus c’est haut, plus c’est chaud, j’explique. Toutes les trois sont impressionnées par la chaleur. Solène garde la main devant le nez pour « ne pas respirer l’air chaud » me dit-elle. Une seule consigne, si l’on se sent pas bien, on sort.
Elles restent un moment, peut-être cinq minutes puis demandent à sortir. Passage par la douche, et nous rejoignons Papa dans le bain nordique, dehors. Alors que j’étais arrivée en manteau, maintenant l’air extérieur ne me paraît plus froid du tout. La fraîcheur fait même un bien fou après ce trop plein de chaleur. Le bain nordique est simplement exquis, 37°C sous les sapins, et vue sur le lac. « Bon, on va se baigner dans le lac ? » demande Capucine qui n’a peur de rien, et surtout pas de se baigner dans un lac, quelle banalité.
Tout est aménagé pour pouvoir accéder au lac pieds nus. Sur le ponton, une installation fait passer des tuyaux d’eau chaude sous le tapis certainement pour éviter que le passage ne gèle l’hiver. Au bout, des marches. Il n’y a plus qu’à descendre dans l’eau froide. Une formalité pour Capucine et Pierre. Un autre combat pour moi. Et Solène n’essaie même pas. Bon, je me force. J’y entre jusqu’au nombril, c’est déjà pas mal. Allez, retour au sauna.
Du sauna au lac
Le reste de notre après-midi ne fut qu’un bal de va-et-vient entre sauna, bain chaud et lac. Parfois au bénéfice d’un rayon de soleil, parfois sous une petite pluie. « Et le bain à 3°C, il faut essayer ! » réclament Capucine et Lison. Je laisse leur Papa les accompagner. Pierre arrive à rentrer dedans et en ressort tout rouge, comme la plupart des gens d’ici. Les filles y entrent le nombril en se retenant de crier. Solène et moi, nous les regardons de loin en restant au chaud dans le bain nordique, amusées. D’ailleurs, Solène restera là toute la fin de journée, elle préfère sa pataugeoire à la chaleur du sauna. Avec Pierre, nous nous relayons pour rester avec elle tout en pouvant profiter du sauna et du lac.
Dans le bain nordique, les gens essayent de sa détendre malgré la présence des enfants qui se retiennent de sauter partout. Les nôtres ne sont pas les seules et nous n’avons pas l’impression de déranger. Par contre, les gens ne parlent pas entre eux. Ils restent soit silencieux, soit parlent au sein de leur petit groupe d’amis ou de famille, pas au-delà. Il n’y a que l’homme de l’accueil qui s’amuse de prendre de nos nouvelles, curieux de savoir comment des novices aiment cette pratique typiquement scandinave. Des étrangers débarquent visiblement souvent ici, nous apposons difficilement une épingle au sud de la France pour noter notre provenance, c’était le seul endroit encore libre sur le petit planisphère en liège de l’accueil. Un au-revoir. Nous sommes tout pâteux et heureux.
De retour à la maison, oups, nous avons oublié une serviette et notre gourde. J’y retourne, l’homme me regarde revenir en souriant. « It is usual, when you got to sauna, you always forget something ! » Ha, c’était ça tous les petits panneaux sur le chemin ! N’avez-vous pas oublié votre maillot ? Votre serviette ? Votre gourde ? Vos claquettes ? Est-il placardé partout, en finlandais.
Pour spot ce soir, nous n’irons pas loin. La plage publique de l’autre côté du lac. S’il fait beau demain nous pourrons nous baigner, l’endroit est très joli. Un petit graillou un peu typique pour parachever cette journée mémorable, pain sec, fromage frais et tranchettes de saumon. Avec quelques légumes crus. Et un grand yaourt aux myrtilles fraîches. Définitivement, nous adorons la Finlande.
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