Un avant-goût de carapate

Vendredi 2 juin 2017. Rodez. La voilà notre grande aventure qui commence. 23h, au sortir d’une réunion professionnelle le grand écart est saisissant. 

Notre tribu sagement attachée autour de la table centrale du camping-car, j’ai l’impression de prendre discrètement la poudre d’escampette pour filer vers notre étoile, celle à laquelle nous avons accroché notre rêve. Le moment est fabuleux.

Depuis 4 ans, notre « Carapate » me trotte dans la tête. D’abord rêve intérieur, Pierre l’a reçu en me rétorquant qqch comme : « Pourquoi gardes-tu ce rêve pour toi ? Moi j’ai envie de le faire avec toi. » Pour de vrai ? Ok ! Il ne faut pas me le dire deux fois.

Un rapide calcul et les dates sont calées : nous partirons de juillet 2019 à août 2020, lorsque que Lison aura 7 ans pour pouvoir bien s’en souvenir. Ce qui nous laisse aussi du temps pour résoudre les questions budgétaires. Nous sommes en 2013.

Cette escapade de juin 2017 est marquante à plusieurs égards. D’abord car il faut avouer que c’est bien la première fois que nous mettons les pieds dans un camping-car. Il nous vaut mieux nous assurer que ce mode de vie nous convient avant d’embarquer pour une année entière ! Ensuite car nous partons rencontrer Louise qui à juste un mois est le premier bébé de nos amis Claire et Etienne, et ça c’est toujours un moment magique. Enfin, ce qui me marquera le plus de cette escapade, c’est l’ambiance extraordinaire qui a régné dans notre cocon familial pendant ces 3 jours. Ambiance escargots.

Cette nuit du 2 juin, nous avons pris la décision de partir même tard car l’impatience était trop grande. Nous n’avons pas du tout l’ambition de rouler toute la nuit, en fait nous avons surtout très envie de passer notre première nuit dans cet engin inconnu. À l’intérieur de l’habitacle, nous avons du mal à nous parler. Le camping-car fait le vacarme d’un vieux camion. Tout tremble sous nos pieds. Nous sommes tellement haut au dessus de la route, cela me donne le sentiment de voler sur un tapis volant mécanique et brinquebalant. Planant.

Nous nous arrêtons après une heure de route à Capdenac-le-haut, sur un emplacement pour camping-car que nous avions déjà repéré lors d’une précédente escapade. Les enfants, endormis depuis longtemps, sont transférés dans leurs lits et nous pouvons enfin profiter du petit nid douillet caché dans la capucine.

Le petit matin est pluvieux, et le petit dej’ autour de la petite table et grandement jouissif. Les filles comme à leur habitude occupent tous les espaces, parlent, blaguent et ne s’arrêtent pas.

Les soins du matin sont faits avec entrain et lorsque la tribu est prête, attachée autour de la table et équipée de tout l’attirail jouets, cahiers de coloriages, feutres, livres,… nous prenons la route vers notre première étape : Rocamadour.

Rocamadour

Arrivés, nous nous stationnons comme des moutons dans le parking des camping-car, trop timides pour oser quoi que ce soit d’autre. Les circuits imposés aux camping-car ne nous font pas rêver du tout, mais pour l’instant les apprentis que nous sommes n’auront pas la prétention de ne pas rentrer dans le rang. Jusqu’ici la pluie nous a suivi, alors nous ouvrons les placards magiques du camping-car et nous nous servons de pulls, parkas de pluies, parapluies,… Le camping-car de Niki et Rotchi, c’est comme le sac de Mary Poppins : on y trouve tout ! 

La pluie ne nous lâchera pas de la matinée, mais nous resterons heureux comme des escargots de vivre cette journée extraordinaire.

Des escargots il y en a des dizaines tout au long du chemin de croix. À 5 et 7 ans, les filles se font une joie de ramasser et de garder dans leurs paumes quelques-uns de ces gluants confrères qui comme nous, s’amusent-elles, « promènent leur maison ». Solène, elle, à 1 ans, découvre l’espèce.

« T’as vuuu ?? »

Pénétrants dans le sanctuaire, nous entendons qu’une messe est en cours. Dans la Basilique Saint-Sauveur, personne. D’où viennent ces chants bénis ? Suivant nos oreilles nous arrivons dans la toute petite crypte Saint-Amadour. Plusieurs prêtres, des enfants de cœur et quelques rangs de pèlerins remplissent l’espace. Nous embarquons sans retenus dans leurs prières, communion, angélus. Comme c’est drôle. À peine commencée notre aventure nous amène a Dieu. Croyants comme nous le sommes, évidemment nous recevons le message. Nous pouvons avoir confiance, tout quitter, embarquer nos enfants, partir. Dieu fera route avec nous.

Pour midi nous nous réchaufferons dans un bouig touristique mais agréable. Évidemment avec ce temps il n’y a pas beaucoup de touristes. Au moment de remonter au camping-car, la pluie se déchaîne et des torrents d’eau dévalent les escaliers du sanctuaire. Les filles se régalent du déluge qui rend l’aventure totale. Il faut vaincre les eaux. J’apprécie aussi le moment. Nous nous réfugions dans la boutique catho du sanctuaire et nous en profitons pour faire nos achats pour les prochaines naissances et baptêmes à fêter. Ces cadeaux là auront une place particulière dans notre histoire. La pluie se calme mais ne s’arrête pas. Nous rentrons trempés.

À ce moment-Là, je mesure à quel point avoir un camping-car est confortable. Les enfants sont déshabillés, les habits étendus, les parapluies sèchent tranquillement dans la douche. Tout le monde a envie de faire la sieste, mais il y a un pb : il n’y a pas de bouton « sieste » sur notre bébé. En parents fourbes et expérimentés, nous mettons en place la stratégie suivante : nous allons prendre la route, Solène s’endormira, nous nous garerons et le tour sera joué. Nous validons la demande des grandes de rouler en restant dans leurs lits et guettant l’endormissement de l’animal, nous prenons la route.

Notre plan fonctionne rapidement. Tout le monde dort. Le camping-car est stationné sur le premier bas-côté trouvé et nous nous cachons tous les deux dans la capucine pour une longue sieste-calin-lecture. Je lis le livre de Jérôme Bourgine, « le tour du monde en famille », qui m’emporte avec eux dans leur voyage. Ce moment de calme et de rêve est savoureux.

Il est 17h tout le monde dort encore. Alors que Google nous annonçait 3 heures 30 de route entre Rodez et Périgeux, là, il me dit qu’il nous en reste encore 2 ! Nous sommes partis hier soir et nous n’avons pas fait la moitié de la route ! Nous avançons donc à vitesse escargot…

La vallée de l’Homme

Alors que tous dorment encore, je me mets au volant de la machine. Des camions, il m’est déjà arrivé d’en conduire mais je suis prudente. La route est minuscule et je suis seule. Go ! Pierre me rejoint rapidement. Les filles allument leurs machines à parler. Pause goûter, on rattache tout le monde et maintenant, il faut les avaler ces kilomètres !

Nous arriverons tranquillement vers 19h30 chez nos amis, épatés de notre projet et du camping-car. Nous découvrons Louise, toute petite, épatés de cet enfant qu’il ont réussi à mettre au monde chez eux. Nous aimons beaucoup ces amis-là car ils dégagent beaucoup d’amour et de confiance.

Côté camping-car, nous ne sommes pas encore suffisamment vaillants pour s’aventurer à faire toutes les douches en son sein. La salle de bain de nos amis est tellement plus confortable ! Aventuriers mais pas trop…

La journée du dimanche, gardant notre allure d’escargots, nous prenons simplement du temps pour être ensemble, visiter les Eyzies, aller sur le lieu de la découverte de l’Homme de Cro-magnon et gravir les falaises animées de bruits d’animaux sauvages qui effraient Capucine, cette aventurière téméraire mais pas trop elle non plus.

Nous quittons nos amis en fin de journée pour entamer la route du retour. Ce soir : c’est repas dans le camping-car ! Nos ambitions seront mesurées : pâtes au fromage. Pour nos nouilles d’enfants, étant donné qu’à leur âge elle n’aiment presque que les pâtes, c’est repas de fête ! Comme la veille, nous gardons la stratégie du rouler-dodo. Ça nous va bien, c’est certainement dangereux, mais tellement confortable pour tout le monde. Nous nous approchons de notre objectif du lendemain : Saint Cirq-Lapopie.

Saint Cirq-Lapopie

Au matin, nous faisons notre première étape-service. Pierre vide les eaux grises puis noires sous les « Beeerkk » des filles qui suivent les opérations de près.

À Saint-Cirq, nous nous garons au parking des bus, plus facile pour se garer que tous ces parkings escarpés. Dans le camping-car magique, les filles ont trouvé une balle de tennis dans laquelle est insérée une longue ficelle. Qu’es a quo ? Dans les mains des filles le machin devient de suite le plus merveilleux des jouets et nous accompagnera toute la journée. Au centre du village, un nouveau moment de grâce nous attendait. Une vingtaine de promeneurs, vêtue de rouge et noir, s’empare de la place et entame des chants lyriques. La ville s’arrête. Les filles sont captivées. Solène agite les bras à la manière d’un chef d’orchestre. Moment béni.

Revenus à Rodez, nous bichonnerons notre camping-car d’emprunt avant de remettre ses clés à Niki et Roland qui nous l’avaient prêté sans conditions. Nous leur raconterons ravis cette expérience nouvelle et prometteuse, en les remerciant infiniment de nous avoir offert ce premier pas dans notre grand projet.

La traversée des Pyrénées

La prochaine expérimentation de vie en camping-car se fera lors de vacances d’été : la traversée d’est en ouest des Pyrénées.

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