Prague au soleil, Prague sous la pluie

Vendredi 14 août 2020. Décidément, cette vue sur la Cathédrale de Prague est aussi belle au matin qu’au soir. Et l’arrêt de bus est à cinq minutes à pied. Ce spot est parfait. Dans le bus, personne ne porte de masque, comme dans les boutiques et musées d’ailleurs. Ici, la vie est normale. Notre première journée à Prague ne sera qu’une déambulation amoureuse d’un bout à l’autre de la vieille ville.

Nous commençons à l’ouest, par Nový Svět, la “rue du nouveau monde”, un bout de campagne baroque qui nous mène jusqu’au quartier du château. Très vite, nous plongeons de plein pied dans l’architecture sophistiquée de la ville. Médiéval, gothique, baroque, renaissance, classique,… et plus loin ce sera art nouveau et même cubisme. Influences romanes et germaniques, protestantisme rigoureux et contre-réforme baroque. Un musée à ciel ouvert. Nous traversons le château, entrons dans cette fameuse Cathédrale Saint Guy que nous regardons de loin depuis hier.

Cathédrale Saint Guy

En 1344, Prague est élevée au rang d’archevêché et la construction d’une cathédrale est entreprise sur les lieux de la basilique romane Saint Vit déjà siège de l’évêché. Le roi Jean 1er, familier de la cour de France, fait appel à un architecte français, Mathieu d’Arras, pour en être le premier architecte. Ce dernier a pour mission de concevoir une cathédrale gothique, typiquement française. Pour cela, il s’est probablement inspiré du plan de la cathédrale de Narbonne. La construction complète a duré près de six siècles, jusqu’en 1929. À l’intérieur, nous sommes frappés par la beauté des vitraux, immenses et tout en couleurs. Tiens celui-ci n’est pas comme les autres, les personnages ont un si beau visage. C’est qu’il est signé d’Alphons Mucha, un célèbre artiste art nouveau, dont nous irons voir le musée demain.

Fleuve de la Vltava

Nous continuons notre chemin vers le fleuve, la Vltava auprès duquel nous trouvons quelques parcs et fontaines pour une pause fraîcheur. Une mamie lance d’une main des graines à toute une petite famille de canards, tout en faisant s’éloigner les pigeons à coups de pieds. Scène adorable et amusante. Elle donne trois poignées de graines aux filles, et se retire pour s’acharner sur ces pauvres pigeons. Nous pique-niquons un peu plus, à l’ombre d’un parc doté de jeux d’enfants. Puis prenons un café et un petit dessert sur une jolie terrasse ombragée. Petit, cela dépend pour qui…

Le pont Charles

Nous voilà prêts pour traverser le fameux pont Charles, ses trente statues et ses dizaines de camelots. Il y a du monde sur ce pont, mais certainement moins qu’à la normale. Par contre ici, le soleil tape de toutes ses forces. Alors nous passons vite et nous nous retrouvons tout aussi vite pris dans l’entonnoir des petites rues de Staré Město, la vieille ville. Vite, un pas de côté, j’avais noté une belle bibliothèque à visiter, mes bouffe-book sont enthousiastes, la visite guidée démarre dans cinq minutes, alors on y va !

Klementinum

Nous nous engouffrons dans le Clémentinium, le collège Jésuite de la ville, construit en 1556. Le lieu a une longue histoire. Un temps université religieuse, un temps allemande, maintenant tchèque. La partie la plus ancienne date du XVIII ème siècle et rassemble quelques 20 000 livres très anciens. L’endroit est gardé comme un trésor et nous n’avons en fait pas le droit de rentrer vraiment dedans, juste de s’avancer de quelques pas après l’entrée de la pièce. Mais qu’importe, ce genre d’endroit dégage une atmosphère magique. Tout autour de la salle, et jusqu’à l’étagère qui est tout à côté de nous, sont soigneusement rangés des livres anciens, soit 400 ans d’âge pour les plus vieux. Et ça, ça en bouche un coin tout de même. “T’inquiète Maman, je viendrai faire mes études à Prague et comme ça j’aurai le droit de les consulter. Je t’enverrai des photos” me glisse Capucine qui visiblement a un plan. Pas de photo autorisée non plus, mais on peut voir des photos officielles du Klementinum par là. Après la bibliothèque, la tour astronomique de l’université. Anciens télescopes, et méridienne. Et au-dessus encore, la vue sur les cent clochers de Prague. Waouhh. Et à l’est, l’orage. Waoouuuh. On ne va peut-être pas rester là très longtemps, non ?

Passion para-tonnerre

À ce moment là, Lison remarque le fil du paratonnerre qui passe sous nos pieds et comprend son utilité. Coup de foudre, révélation. Une nouvelle passion lui est né. Encore une. Les paratonnerres. En regardant bien, on en distingue sur tous les toits alentours. Et même redescendue en bas, elle en voit désormais partout. C’est la paratonnerre-mania. D’ailleurs, nous l’entendons bien, le tonnerre. Il se rapproche sérieusement. Juste le temps de courir jusqu’à la très célèbre horloge astronomique de l’hôtel de ville, de distinguer un peu les personnages tourner, et la pluie tombe pour de bon. Haaaa que ça fait du bien. Franchement, cette douche chaude est d’abord un régal. Et puis des trombes se mettent à se déverser. Un bon orage d’été. Nous trouvons refuge sous l’un des nombreux passages couverts de la ville, et attendons. Quinze minutes plus tard, le ciel s’est calmé et la pluie est douce. On rentre ? Non, pas envie. Nous avons encore un truc à voir dans le quartier. Un truc bizarre, un histoire de Saint chevauchant un cheval mort, une enquête à mener

Cheval à l’envers

Un tram et nous y sommes. Dans la galerie Lucerne, une réalisation architecturale du Père de Václav Havel, délicieusement art nouveau. Là, sous une belle coupole tout en géométrie, est pendu les quatre fers en l’air un cheval. Un cheval visiblement mort, gorge étirée et langue pendante. Charmant. Sur son ventre un chevalier chevauche fièrement le pauvre destrier, comme si de rien n’était. Saint Venceslas. Un Don Quichotte slave.

Les pragois aiment paraît-il cette autodérision. Venceslas, Saint patron de la République Tchèque et Saint patron des brasseurs, conclut la paix avec le roi Henri Ier de Germanie, réforma la religion  dans le Royaume et lança la construction de la cathédrale Saint Guy. Il fût assassiné par son frère Boleslav et lorsque ce dernier devin roi, il se repentit et fit canoniser son frère, devenant ainsi un symbole national. Devant l’œuvre les filles sont ébahies. D’habitude ce sont elles les reines des idées farfelues, les championnes de l’imagination, mais là, elles sont battues à plate couture.

Séance dessin

La sculpture est l’œuvre de David Černý, un artiste tchèque connu pour ses tendances subversives. Les carnets de dessins sont sortis, le tapis rouge de l’escalier menant à la salle de spectacle fera affaire de banquette, et nous nous attachons à déconstruire cette étrange scène.

Un métro. Un bus. Retour à la maison, dans notre gentil quartier résidentiel. La Cathédrale Saint Guy est maintenant baignée de brume.

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