Jeudi 7 août 2025. Bingen, Allemagne. 4h.
Panique au chat
Odeur infecte. La lange de Charlotte la chatte est souillée d’une tâche de selle liquide. Elle essaie de se nettoyer mais son petit fouine dans son ventre. Je change la lange et garde le chaton pour qu’elle se nettoie. Deuxième tâche. Je rechange la lange. Troisième tâche. Je réveille Pierre pour avoir de l’aide. Il prend le chat pour l’amener à sa litière, dans la douche, elle libère alors toutes les selles liquides que visiblement elle retenait difficilement. Le bac de douche est repeint, on a échappé au pire.

Je mets le chat dehors le temps de laver la douche et de changer la litière. Capucine s’occupe de Charlot (Kaïser Châtaigne) le temps que sa maman revienne. Elle ne revient pas. Dans la précipitation, je ne lui ai pas mis son collier GPS. Elle est peut-être encore souffrante ? Capucine confie Charlot à Lison et sort voir Charlotte.
Elle l’aperçoit fuyant sur la route malgré ses appels. Capucine a peur qu’elle s’en aille vraiment. Elle revient chercher un sachet de pâtée et nous repartons ensemble. À quelques centaines de mètres plus loin, elle aperçoit deux yeux briller dans la végétation. Nous secouons le paquet de pâté en appelant Charlotte. Dieu soit loué elle accourt vers nous. Soulagement intense.
Je ne sais pas ce qui lui a pris de nous fuir comme ça, nous et son bébé. Baby-blues ? En deux jours il lui est arrivé beaucoup de choses, trois mises-bas, un bébé à s’occuper tout le temps, deux bébés morts. Une montée de lait qui, j’en suis sûre, est douloureuse. Charlot (ou Kaïser Châtaigne, c’est mieux) n’a pas encore suffisamment tété pour avoir bien dilaté les canaux des tétons, donc les tétés aussi sont encore douloureuses. Et maintenant cette diarrhée aiguë.
Franchement, je la comprends, elle a de quoi avoir envie de fuir. Je crois qu’on est beaucoup de mamans a avoir eu un moment de découragement. En souhaitant avoir cette portée, nous voulions aussi montrer à nos filles ce qu’est la reproduction, animale, instinctive. Depuis le début de cette aventure, nous avons beaucoup eu matière à discussion et partage de connaissances.
Nous rentrons heureusement avec Charlotte et lui donnons sa pâtée. Elle la dévore, elle était affamée. Nous lui lavons l’arrière-train et la replaçons dans sa boîte toute propre, avec son petit bébé. Elle se roule en boule autour de son tout-petit en ronronnant. Soulagement et attendrissement intenses. Notre nuit peut tenter de reprendre.
Mais je n’arrive pas à me rendormir. Je lis des blogs pour chercher si Charlotte a subi un dérangement passager, ou si cette diarrhée est le symptôme de quelque chose de plus grave ? Faut-il l’amener chez un vétérinaire ? Pour l’instant, je la trouve ni fiévreuse, ni fatiguée. Ses tétés sont très gonflée mais à j+2, franchement ça me semble tout à fait normal. Nous verrons demain.
Pas de pain chaud au petit déjeuner, nous n’avons plus de farine. Pas de pain industriel non plus, ni biscuits, impossible de faire des crêpes… Pas même de lait ! Qu’est-ce que je vais donner à manger à mes chatons ? Il me reste une belle casserole de pâtes de hier soir. Avec un œuf au plat. Le petit-déjeuner est servi ! La soupe à la grimace est évitée, elles se réveillent dans la joie d’un œuf au plat.
Vétérinaire en Allemagne
Nous essayons de partir rapidement. Le programme d’aujourd’hui est de visiter Aix-la-Chapelle et nous avons 2h20 de route. Vers 11h, pendant que nous roulons, Lison me préviens que Charlotte est de nouveau sale à l’arrière-train. Je lui propose d’aller à la litière, toujours dans la douche. Elle éjecte alors une deuxième diarrhée aiguë. Je ne sais pas comment elle fait pour arriver à retenir tout ce qu’elle libère maintenant. Nous arrivons à ne salir que le bac de douche. Capucine m’aide à nettoyer le chat.
Cette fois, on va chez le vétérinaire. Un recherche sur Google, GPS, première sortie. Le chat, sa lange et son chaton sont embarqués dans le sac à chat. Pierre nous dépose et en profite pour aller acheter du lait et de la farine. La vétérinaire nous reçoit rapidement. Consultation très douce, bienveillante et tout en anglais. Une piqûre d’antibiotiques, une prescription de smecta pour chat et de probiotiques. Les tétés vont bien. Et la vétérinaire palpe le ventre, elle pense qu’il n’y a plus de bébé dedans. 128€ s’il vous plaît. C’est le prix de leur santé, et de la survie de notre camping car aussi.

Capucine, l’apprentie véto
Je laisse mes deux apprenties véto se battre avec le chat et ses médicaments au camping-car et rejoins mon homme aux courses. Le smecta passe tout seul, mélangé à la pâtée. L’autre est une pâte à lui faire avaler, beaucoup plus compliqué. Mais Capucine a vu plusieurs techniques en stage, pour donner ce genre de pâte à des veaux. Technique numéro 1, elle en met sur son doigt et l’essuie contre les dents du chat. Ça fonctionne. Technique numéro deux, elle en dépose sur son museau et l’animal se lèche spontanément. Ça fonctionne aussi.
Aix-la-Chappelle, ou Aachen
Il est presque 13h, il nous reste une heure de conduite pour rejoindre Aix-la-Chapelle. Un déjeuner rapide et nous reprenons la route. 15h nous sommes garés à l’ombre. Un café-choco pour se redonner un peu d’énergie et nous filons, joyeusement. Un peu de marche pour atteindre le centre ville, 3 kilomètres. Le centre historique semble tout petit, mais très ancien. J’aime beaucoup. À ma grande surprise, la visite de la Cathédrale est gratuite. Nous y entrons vite et pour moi, c’est presque comme un coup de foudre. Non pas qu’elle soit particulière belle, on en a vue plein de très belles églises. Mais surtout parce qu’elle rassemble plusieurs styles architecturaux que nous avons déjà rencontrés ailleurs. Les souvenirs remontent en se bousculant.
La cathédrale d’Aix-la-Chapelle, mosaïque de styles architecturaux
L’église San Vitale de Ravenne d’abord, évidemment, avec ses grandes mosaïques colorées, ses personnages saints et ses motifs floraux. Que c’est beau ! Les mosaïques ne sont pas aussi anciennes, les couleurs sont vives et le doré étincelle, elles ont été refaites en 1880. Je me souviens de l’émotion qui m’avait traversé à Ravenne, une des journées les plus froides de notre Carapate, dans cette église des premiers chrétiens. Le sol aussi, composé de motifs en marbre, est très similaire à celui de San Vitale, juste moins usé. Et son plan, octogonal, byzantin.



Nous reviennent en mémoire également les chandeliers des églises orthodoxes, qui trônent au centre de l’octogone. Ceux des monastères des Météores en Grèce, que Lison avait méthodiquement dessinés. Ou celui de la Cathédrale Alexandre Nevski à Sofia, en Bulgarie. Immense.
La cathédrale de Charlemagne
Les colonnes de style grecque aux chapiteaux corinthiens. Charlemagne les auraient fait venir de Rome. Le chœur gothique a été construit en prenant pour modèle la Sainte-Chapelle de Paris. Il abrite les ossements de Charlemagne dans une châsse, pinpante boîte en or.




À la fin du 8e siècle, Charlemagne crée à Aix-la-Chapelle un immense palais, dont il ne subsiste que la chapelle palatine. La construction de la cathédrale s’étend du début du Moyen Âge à la fin des temps modernes. C’est ce qui explique sa structure hétérogène, influencée par les styles artistiques et architecturaux de différentes époques et par les multiples remaniements, démolitions et ajouts qu’elle a connus.
Enchantés par cette entrée en matière, nous flânons autour de la Cathédrale, son architecture éclectique saute aux yeux. Une miniature en bronze nous permet de la toucher sous toutes les coutures. Une mignonne fontaine pleine de petits moineaux. Une autre trop drôle présente des personnages articulés et articulables. Nous nous amusons à leur donner moultes positions expressives. Ils représentent les traditions de la ville : science, équitation, industrie textile et carnaval.
Derrière la Cathédrale, un bac à sable géant, rempli de mioches bruyants. L’horreur. Heureusement que nous n’avons plus de petits. Maman, on peut rester jouer ?! Vous ? Mais vous êtes trop grandes ! Oui, mais c’est chouette quand même.
Festivités d’été à Aix-la-Chapelle
Trois sculptures de chats plus tard, nous pouvons passer à la place d’à côté, place du marché, devant l’hôtel de ville lui aussi remarquable. Gris, haut et imposant. Construit au 14e siècle en style gothique, il repose sur les fondations de l’ancien palais de Charlemagne. 60 statues d’empereurs et de rois allemands surveillent la place qui est particulièrement animée aujourd’hui. Un dj mixe de la techno et une poignée de cabanes proposent différentes spécialités de street food.







Coup de foudre pour la boutique de Langos, cette spécialité hongroise de pâte à pizza frite, agrémentée de crème et d’oignons verts. Gras et délicieux. Nous les avions justement découverts à Budapest. La file est longue mais pas assez pour nous décourager. Comme la place est bondée, toutes les tables sont prises et nous nous installons sur les marches de la fontaine de Charlemagne pour déguster nos langos. Il est 18h.
3 kilomètres de marche pour rentrer à la maison. Nous prenons la route rejoindre un parking de randonnée en Belgique toute proche, dans le Parc naturel des Hautes Fagnes. Demain, nous aurons l’embarras du choix : rando-tourbière ou tour à vélo, ou les deux.
Point prénoms du jour. Charlot perd de la vitesse, je suis désespérément la seule à l’appeler ainsi. Kaiser Châtaigne est progressivement utilisé par les uns et les autres. Ce n’est pas un prénom, ça !
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