Épidaure, le son et les songes

Jeudi 20 février 2020. J234. Nauplie, Grèce. Les nuages ont couvert notre horizon ce matin. Leurs jeux de lumières sur les reliefs sont autrement beaux. Je suis sortie dehors la première et je marche le long de cette immense plage, jusqu’au bout, tout au bout. Nos trois camions-maison sont devenus minuscules.

Comme tous les matins, Thomas se fait envahir de mômes dès le petit-déjeuner. C’est qu’il prépare des œufs brouillés, c’est pas malin. Thomas a trouvé une solution, il pourra être aux obsèques de son Papi à Niort. Il prend l’avion à Athènes demain à l’aube. Et restera donc avec nous encore aujourd’hui.

Ce matin, comme tous les matins, nous avons du mal à quitter notre spot. Être seuls sur cette immense plage, enveloppés de paysages, ça nous va si bien. Et puis il y a quand même une montagne de vaisselle à faire, il n’y a pas de lave-vaisselle dans un camping-car…

Non, ce n’était pas mieux avant

Le Théâtre d’Épidaure, comme souvent dans la Grèce antique, est l’un des monuments d’un sanctuaire dédié à un Dieu. Ici, c’est Asclepios, le Dieu guérisseur. Le sanctuaire était un haut-lieu de la médecine grecque, rien de moins que le premier hôpital de l’antiquité. Les médecins, disciples d’Asklépios, soignaient d’une façon bien particulière. D’abord, on égorgeait des animaux en sacrifice aux Dieu. Après s’être enroulé dans la peau de l’animal sacrifié, les malades s’assoupissaient dans l’avalon, le dortoir sacré, peuplé de serpents inoffensifs. Charmant hôpital. Pendant leur songe, Asklépios leur apparaissait.

Les prêtres recommandaient aux malades d’être particulièrement attentifs à l’aspect qu’aurait le visage du dieu. Il pouvait apparaitre barbu, jeune garçon, accompagné ou non d’une de ses filles, ou sous la forme d’un chien ou d’un serpent sacré. La forme de l’apparition dictait le traitement. Les plus chanceux étaient guéris dès le réveil, le dieu ayant touché directement l’organe malade. Si le malade n’était pas visité par le dieu, il devenait donc incurable. Dans le musée, nous découvrons cette histoire et de vieux instruments chirurgicaux. Nous qui étions venus voir une salle de spectacle, nous sommes… refroidis.

Le théâtre grec

Le célèbre théâtre est en réalité la première chose que tout bon touriste s’empresse de voir. Son aspect, lové dans la colline, est majestueux vu d’en bas. Nous nous installons sur les sièges d’honneur, les proédria, pour lire nos guides. Autour de nous, 11 991 places vides. Nous sommes seuls, à quelques visiteurs prêt, dans le site touristique le plus fréquenté du Péloponèse.

L’acoustique du théâtre est simplissime, et bougrement efficace. Un claquement de mains, un chant, une poésie,… se propagent en ligne droite sur les gradins, sans écho aucun, et est amplifié par les creux présents sous les assises. Ha non, pas le droit de chanter. Une femme entonne un air d’opéra et se fait immédiatement siffler par les matons. Décidément, l’accueil des grecs est très moyen. Avec Mathéo nous tentons quelques claquements de mains. Avec Capucine nous tentons une fable. Le micro de mon téléphone n’est évidemment pas performant pour retranscrire fidèlement l’effet produit. Mais en tendant l’oreille, vous entendrez que sur les première marches, comme sur les dernières, le son a le même volume.

Pour préparer cette vidéo, Mathéo aura écrit chaque information sur son carnet de dessin. Émilie sait qu’il n’aime pas écrire, elle est impressionnée. Il faut monter les 55 rangées de gradins pour mesurer la grandeur du site. Tout en haut, à 22 mètres au-dessus de la scène, le spectacle est grandiose. Absolument fabuleux. Nous y restons longuement. Les enfants ont entrepris de remplir leurs cahiers de dessin. Chacun s’applique à tracer cet immense demi-cercle, ou quelques sculptures du musée. Nos filles ont l’habitude de l’exercice. Solène, du haut de ses bientôt quatre ans, n’a pas peur de s’attaquer au théâtre.

Léonie et Mathéo inaugurent leur carnet de dessin. Et comme nos filles, ils dessinent à cœur joie, en s’installant n’importe où, sur un gradin, par terre, sur le sol du musée. Les gardes sont épatés. Tout le monde dessine. Comme quoi, nos filles ne sont pas hors du commun. Donnez un carnet de dessin à un enfant et amenez-le au musée, il se tiendra sage et risque d’y passer des heures.

Corinthe

C’était la dernière visite tous les neuf. Nous nous embrassons. Thomas s’en va à l’aéroport. De notre côté nous partons pour Athènes, mais avant nous jetons un coup d’oeil sur le canal de Corinthe.

Arrivée à Athènes

Nous rejoignons le centre d’Athènes pour pouvoir visiter la ville demain. Un stationnement au parking du cimetière, très central et très calme. La traversée de la ville est hasardeuse, comme à chaque grande ville. Nous essayons de traduire les panneaux du parking pour en comprendre les règles. Payant seulement la journée mais maximum trois heures. Peut on laisser nos camions toute la journée de demain ? On prendra le risque. Ici, il y a les gardes du cimetière, l’endroit nous paraît sûr. Le quartier semble être populaire. Plus loin, il y a plusieurs restaurants mais rien de touristique. J’aime bien ça. Comme il est tard, ce sera restaurant ce soir.

Nous choisissons le premier, une espèce de grande salle de cantine, chaleureuse et encore à moitié vide. C’est grand, c’est simple, parfait pour notre troupe. Le serveur arrive d’un pas hâtif. Avez-vous réservé ? Certainement pas. Il s’en va, je crois qu’il nous prépare une table. Un client nous croise en sortant et nous explique que c’est jour de fête orthodoxe. Une fin de carême. Les gens se sont privés de viande pendant 14 jours, alors ce soir, tout le monde sort au restaurant. Effectivement, de grandes tablées sont réservées. Notre serveur revient et nous fait signe, nous avons deux petites tables derrière le stock de cubis de vin. Nous sommes contents. L’endroit n’est pas très confortable, mais si il y a autant de clients locaux dans ce restaurant, c’est qu’on doit bien y manger. Les enfants assis, les parents se serrent en bout de la table, il n’y a pas une place pour chacun. Le serveur nous donne le menu, une feuille pliée en quatre, écrite en anglais, ouf. Séance traduction. Les enfants veulent des spaghetti bolognaise, pas question. Ici, nous mangerons grec, ça fait partie du voyage. Nous demandons à Google de nous montrer des images de certains plats. Il faut nous assurer que ça pourra convenir aux palais difficiles de nos mini-voyageurs. Nous décidons d’essayer plusieurs spécialités, plusieurs assiettes que nous mettrons au centre de la table et chacun picorera. À l’albanaise en sorte.

Le défilé des plats commence. Très vite, il n’y a plus de place sur nos deux petites tables. Tarte aux épinards et au fromage, moussaka, porc en sauce, brochette de poulet, feuilles de vigne, fêta grillée au four, tzatziki… Les enfants trouvent leur bonheur dans une assiette ou dans une autre, c’est très bien ainsi. Nous goûtons à tout et nous nous régalons. Tout est très bon, cuisiné maison.

Les enfants sont fatigués. Capucine s’endort même le front posé sur le mur. Surprenante. Nos maisons ne sont pas loin, juste au bout de la rue. Première nuit en ville pour Émilie. Ce n’est plus le spot de rêve d’hier soir. Nous partageons les toilettes de l’Emile-Pat, chacun s’enferme bien dans son camion, la nuit sera tranquille à côté du cimetière.

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